Le jeudi 28 Mars 2019, Multi’form organise sa première sortie de l’année dans le Vermandois et la Thiérache. Le thème de cette sortie : le centre de tri des ordures ménagères, la maison Matisse et la maison de textile, ne m’inspirait pas grand-chose. Comme je voulais retrouver les amis, les connaissances et surtout l’ambiance agréable et chaleureuse de ces voyages, je me suis inscrite avec 36 autres participants . Joël fut déçu du petit nombre de participants. Mais à mon grand étonnement, cette sortie fut très réussie, intéressante et enrichissante.
Comme d’habitude, nous prenons un car du Cambrésis conduit par Roger à Le Cateau, Caudry et Cambrai entre 7h et 7h30. Nous passons par l’autoroute pour pouvoir nous arrêter sur une aire de repos, y faire l’arrêt pipi et y déguster notre croissant et notre boisson habituels.
Vers 9h45, nous arrivons au site de Valor’Aisne, centre de traitement des déchets ménagers de l’Aisne dont le logo est : « le tri, on a tout à gagner »
Une guide nous accueille et nous présente d’abord le fonctionnement de ce service public du traitement des ordures ménagères. Il fut créé en 2003 sous l’impulsion du Conseil Général. Le site d’Urvillers fut ouvert en 2015.
72 personnes y travaillent. Il accueille les déchets recyclables de près de 400 000 habitants et peut traiter jusqu’à 28 000 tonnes de ces déchets. Pour sensibiliser la population à l’utilité du tri des déchets, le site d’Urvillers permet les visites du centre de tri. Il reçoit près de 400 adultes par an ainsi que 700 scolaires.
Puis, la guide nous entraîne au 2ème étage pour une promenade qui surplombe toutes les installations du tri. On y voit de nombreuses machines et des tapis roulants entraînant des déchets de toutes sortes .
Le camion poubelle qui a collecté les déchets recyclables est d’abord pesé avant de décharger au sol dans le hall de déchargement. Chaque jour, arrivent 100 tonnes de ces déchets recyclables. Puis un engin les met dans une trémie qui alimente un tapis roulant. Un premier tri sépare les gros déchets ( cartons, sacs plastiques) des déchets plus petits. Sur le tapis gros déchets, les agents retirent les gros sacs plastique et tout ce qui n’est pas carton. Puis, les déchets passent dans un autre équipement qui permet la séparation des corps creux comme les bouteilles, les canettes, les flacons et les corps plats, le papier, les journaux, le carton. Des agents, près des tapis roulants, vérifient et corrigent les erreurs du tri des machines à une cadence assez rapide. Une machine trie les déchets selon leur type de matériau et leur couleur et des agents vérifient et corrigent à chaque fois les erreurs de la machine. Pour terminer, un système informatique déverse automatiquement le contenu des box dans la presse à balle. Les déchets sont alors compactés par matière. Chaque fois, nous constatons que les agents sont soumis à des cadences infernales.
Que deviennent tous ces matériaux recyclables ? Nous retournons dans la salle d’accueil où des panneaux nous montrent leur devenir. Ainsi les papiers et cartons retournent à l’état papier et carton, les métaux sont broyés, fondus, étirés pour former des lingots ou des plaques qui seront réutilisés pour faire d’autres objets métalliques. Les bouteilles en plastique transparent sont lavées, broyées en paillettes qui seront ensuite fondues et étirées en fils très fins de polyester avec lesquels on pourra fabriquer des vêtements polaires. Les bouteilles en plastique opaque subissent le même sort. Leur paillettes seront transformées en granulés qui, fondus, serviront à fabriquer d’autres objets.
Pour terminer, la guide nous présente quelques déchets et nous demande de les trier comme à la maison : poubelle jaune, poubelle bordeaux. Notre groupe a bien réussi le challenge à part la boîte de Coulommiers en bois qu’il faut mettre dans la poubelle bordeaux ou brûler dans le barbecue.
Mais que deviennent les déchets non recyclables ? Les déchets périssables comme les épluchures de légumes doivent aller dans un composte ou être donné aux poules. Le reste des ordures ménagères non recyclables est compacté et stocké dans des alvéoles étanchéifiées qui peuvent recevoir 80 000 tonnes de ces déchets. Que vont devenir ces déchets ? Qu’est ce que cela donnera dans 10 ans dans 100 ans ? Ce sera peut-être du travail pour les archéologues du 3ème millénaire !!!
Vers 10h45, nous reprenons le car direction Saint Quentin
Nous attendons un peu notre guide qui s’était trompé de lieu de rendez-vous. Il nous explique que Saint Quentin est une ville qui a beaucoup souffert de la 1ère guerre mondiale. Les Prussiens ont investi toutes les belles maisons, forçant les habitants à évacuer. En 1917, la ville est pillée et tout son équipement industriel emporté ou détruit. Entre les 2 guerres, 3 000 bâtiments furent reconstruits de style Art Déco, certains étant même inscrits au patrimoine culturel. Le développement de la ville a repris jusqu’en 1970 où l’industrie textile souffre de la concurrence de pays comme la Tunisie ou la Turquie. Le guide nous explique que le centre de la cité, bâtie sur des galeries souterraines, s’effondre progressivement. La circulation automobile y est interdite pour l’instant. Nous ne parcourons donc que les boulevards, les quartiers excentrés et allons même jusqu’ Gauchy. Nous partons donc des Champs Élysées où Nadine de Rothschild aime à dire qu’elle y est née alors qu’elle est née dans la rue Jeanne d’Arc, petite rue qui donne sur les Champs Élysées. Les boulevards que nous empruntons sont souvent bâtis sur les anciens remparts qui entouraient la ville au Moyen Age . Le guide nous montre de temps en temps des béguinages qui, au Moyen Age, servaient de refuge aux femmes pures et chastes qui portaient sur la tête un bonnet appelé un béguin ( d’où le nom de béguinage). Puis au XIXè siècle, ces bâtiments ont été occupés par des ouvriers textiles et aujourd’hui, ils hébergent des retraités valides qui vivent en communauté . Ces bâtiments sont construits en forme de U avec une cour centrale où les commérages et les cancans ont la part belle !!!!
Nous passons par le faubourg de l’Isle, traversons le pont d’Isle avec ses 2 phares en Art Déco et voyons la gare bâtie sous Napoléon III
Nous continuons notre route jusqu’à Gauchy cité ouvrière textile riche d’usines mécaniques, de cosmétiques et de fibres artificielles. Le guide nous apprend que ses habitants se nomment les Gasiaquois et les Gasiaquoises. Nous revenons vers Saint Quentin et nous admirons le monument aux morts en face de l’étang d’Isle.
C’est un mur de granit de 31m de long sur 18 m de haut et repose sur des pilotis en ciment. Nous passons devant le monument érigé pour remercier les Belges d’avoir accueilli des Saintquentinois chez eux pendant la guerre. Nous passons aussi devant le Lycée Henri Martin bâti au XIXè siècle et où Henri Matisse a fait ses études de clerc de notaire.
Vers midi, le car nous emmène vers Macquigny où on nous attend au restaurant de la ferme de Jonqueuse. Nous y avons très bien mangé :
– un cocktail thiérachien à base de cidre
– une ficelle picarde
– un sauté de veau avec une purée de carotte et un gratin dauphinois
– quatre choux à la thiérachienne
– vin rouge, eau et café
A 14h10, nous reprenons le car pour la visite de la maison familiale de Henri Matisse à Bohain
Nous sommes accueillis par 2 guides qui nous laissent d’abord regarder une exposition temporaire.
La guide nous parle ensuite de la vie de Matisse à Bohain-en-Vermandois jusqu’à l’âge de 20 ans.
Henri Matisse est né le 31 Décembre 1869 à Le Cateau Cambrésis chez ses grands-parents maternels, les Gérard, famille de tanneurs. Peu après sa naissance, ses parents ouvrent une graineterie à Bohain. Henri est un garçon méditatif et fragile qui ne rêve que d’être acrobate ou clown. Mais son père veille, d’un œil sévère, à son éducation qui le conduira au collège du Cateau puis au lycée Henri Martin de Saint Quentin. Opéré de l’appendicite, il s’ennuie. Sa mère lui offre une palette de peinture. A partir du moment où il a eu cette boîte de couleurs entre les mains, il a senti que c’était là sa vie . Il entre en cachette à l’école de dessin de Saint Quentin. Un de ses professeurs lui conseille d’aller sur Paris où il prend des cours à l’école des Beaux-Arts. C’est sa mère qui le finance discrètement parce que, pour son père, on ne gagne pas sa vie en étant peintre.
A 24 ans, il a une fille hors mariage, Marguerite, qu’il élèvera seul. Puis, il se marie avec Amélie, aura 2 fils Pierre et Jean. Sans le sou, il revient à Bohain avec sa famille en 1902. Là, il est très mal vu de la population . On l’appelle « le barbouilleur », peintre veut dire bon à rien, il ne sait rien faire etc …… Il quitte donc rapidement Bohain.
Puis, la guide nous entraîne pour la visite des différentes pièces de la maison.
Au cours de cette visite, elle nous raconte qu’elle a reçu, en 2003, un monsieur venu visiter la maison telle qu’elle était à cette époque, après quelques grainetiers qui s’y étaient succédés. A la fin de la visite, le monsieur, ému, en pleurs s’est présenté comme étant un petit-fils de Henri Matisse. Il voulait voir où avait habité son grand-père et où avaient travaillé ses arrière-grands-parents. Il a alors payé sur ses deniers personnels la restauration de la maison et a donné quelques meubles ayant appartenu à Henri comme les meubles de sa chambre ( entre autre, un lit de 1,20m de large!) ou ceux de son bureau-atelier ainsi que de nombreuses photographies de la famille.
Dans une pièce, la plus grande, qu’on suppose être la chambre des parents, on peut y voir un petit métier à tisser à main et un rouet signe que Bohain fut au siècle dernier une cité textile. Dans une autre pièce, on peut voir du mobilier de grainetiers.
Puis, la guide nous entraîne au 2ème étage, le grenier, où sont encore toutes les machines qui servaient au travail du grainetier. Son travail consistait à préparer les commandes de ses clients particuliers et agriculteurs. Il devait nettoyer les grains qu’il recevait des coopératives agricoles, les ensacher et les livrer.
Nous redescendons ensuite dans une salle où on nous projette une vidéo sur l’enfance de Matisse sur fond musical et visuel de cirque.
A l’extérieur, on peut encore voir le treuil qui servait à monter et descendre les gros sacs de graines jusqu’au 2ème étage.
Puis, nous reprenons le car pour Fresnoy-le-Grand où nous visitons la maison du textile.
Ce musée est implanté dans une ancienne entreprise textile « La Filandière ». Après sa liquidation judiciaire, le Conseil général a repris les 28 métiers Jacquard qui nous permettent, aujourd’hui, de voir et de comprendre les différentes techniques de tissage ( Jacquard et Aubusson) et de broderie d’hier.
Une guide nous entraîne au milieu de toutes ces machines et tente de nous en expliquer le fonctionnement avec des mots comme fils de trame, de chaîne, lisses, navettes, ourdissoirs, cartons perforés etc …..
Elle nous montre les différentes étapes pour la fabrication d’une tapisserie comme celle du baiser de Gustav Klimt : le dessin puis la reproduction sur papier calque, le comptage des points, la préparation de cartons, leur perforation, leur installation sur le métier Jacquard, la préparation des fils de chaîne, la préparation de navettes et tout ce que j’ai oublié etc …. Cette tapisserie a demandé 6 mois de travail et coûte 6 000€ à la vente !
Nous voyons le travail que cela représente avec un artisan, Gérard, qui travaille en ce moment sur une tapisserie « la Dame à la Licorne ». Il fait le tissage à l’envers et tous les 2 cm, il vérifie qu’il n’a pas fait d’erreur de couleur. En une journée, le travail avance de 9 à 15 cm !
Au milieu de tous ces métiers, le musée abrite un métier à tisser ayant appartenu à la maison Chanel.
Puis, nous voyons en fonctionnement un métier à broder mécanique. Une vidéo nous en explique le principe.
Enfin, nous passons dans un autre bâtiment où est reconstituée la maison d’un tisserand avec le métier au milieu de la pièce éclairée par 4 fenêtres en façade. Autour se trouvent tous les meubles qui permettent la vie d’une famille où tout le monde est mis à contribution.
La guide en profite pour nous donner la différence entre un tisseur et un tisserand. Un tisserand travaille chez lui et est payé à la pièce alors qu’un tisseur travaille en usine et est payé à l’heure.
Nous repassons ensuite par la boutique où certains font des achats.
A la sortie, avant de reprendre la route, nous dégustons nos bulles habituelles.
Nous reprenons la route sous le soleil et tranquillement le retour se fait d’abord par Le Cateau
Vers 18h30 chacun doit être rentré chez lui ravi de cette journée agréable, passée en bonne compagnie et riche en découvertes. Maintenant nous pourrons trier nos déchets avec plus de conviction et nous pourrons apprécier à sa juste valeur une belle tapisserie.
Article de Denise DEBOURGIA et photos de Claude LEVEQUE